Le droit de vivre dans son milieu : quand le transport adapté fait défaut, ce sont les personnes handicapées qui paient le prix
L’histoire de Pâquerette Gagné, racontée récemment dans La Tribune, illustre de façon dramatique une réalité trop fréquente au Québec : faute d’un service de transport adapté adéquat, elle a dû quitter son milieu de vie, ses réseaux sociaux et ses repères pour déménager à Sherbrooke.
Atteinte de sclérose en plaques et utilisant un fauteuil roulant, Mme Gagné n’a pas eu le choix. Les horaires, trajets et ressources limitées de son service régional ne permettaient plus de répondre à ses besoins. Son témoignage est bouleversant : « Si ce n’était du transport, je serais demeurée à Windsor. »
Cette histoire est loin d’être isolée. Dans nos propres MRC du Centre-du-Québec, plusieurs personnes handicapées sont confrontées aux mêmes obstacles. Dans L’Érable, à Bécancour, à Nicolet-Yamaska ou encore dans Drummond, nous entendons trop souvent des récits semblables : des citoyennes et citoyens obligés de restreindre leur vie sociale, leurs études, leurs soins de santé et parfois même leurs choix de résidence en raison de l’absence d’un transport adapté fiable, flexible et financé à la hauteur des besoins.
Un enjeu de droits, pas seulement de mobilité
Ne l’oublions jamais : le transport adapté n’est pas un luxe. C’est un droit fondamental lié à la pleine participation sociale des personnes handicapées. Quand l’État sous-finance les services, il ne prive pas seulement d’un déplacement, il prive d’un emploi, d’une visite chez le médecin, d’une activité culturelle, d’une vie citoyenne. C’est un obstacle direct à l’exercice de droits déjà consacrés par la Loi assurant l’exercice des droits des personnes handicapées.
Les régions laissées pour compte
Au Québec, plus de 85 % des organismes de transport collectif se trouvent en milieu rural, mais ils desservent une minorité de la population et reçoivent des miettes du financement public. Comment justifier qu’à peine 0,34 % de l’investissement gouvernemental en transport collectif annoncé en 2024 soit allé aux 33% de la population qui vivent en milieux ruraux ? C’est une injustice flagrante qui condamne des personnes comme Mme Gagné à l’exil forcé.
Au Centre-du-Québec, cette sous-financiarisation se traduit par des services morcelés, des horaires trop restreints, des déplacements refusés ou des délais inacceptables. Résultat : des citoyennes et citoyens enracinés dans leur communauté doivent choisir entre l’isolement ou l’exode vers de plus grands centres.
Garder les personnes dans leur communauté
Notre regroupement le répète haut et fort : les personnes handicapées doivent avoir le droit de vivre et de s’épanouir dans leur milieu. Forcer un déménagement en raison d’un service de transport déficient, c’est nier le droit de choisir son lieu de vie et c’est porter atteinte à la dignité.
Nous demandons au gouvernement du Québec et aux élus municipaux de la région d’adresser les enjeux de transport adapté en milieu rural. Il faut cesser de traiter les personnes handicapées comme une variable d’ajustement budgétaire.
Parce qu’au Centre-du-Québec comme ailleurs, chaque citoyenne et citoyen mérite de rester ancré dans sa communauté, entouré de ses proches, et non d’être contraint à l’exil pour accéder à un droit fondamental : celui de se déplacer.
