Un pas important pour protéger les enfants handicapés contre la violence sexuelle
Le Devoir rapportait le 25 septembre que le centre Marie-Vincent lance le programme Voies, spécifiquement conçu pour mieux protéger les enfants ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme contre les agressions sexuelles.
Cette annonce est une bouffée d’air frais dans un contexte où les chiffres donnent froid dans le dos : selon Marie-Vincent, les enfants ayant une déficience intellectuelle courent un risque de deux à huit fois plus élevé d’être victimes de violence sexuelle que leurs pairs neurotypiques. Quant aux enfants autistes, leur risque est de trois à quatre fois plus grand.
Ces données sont terrifiantes, mais elles ne surprennent pas les familles et les organismes de notre région. La vulnérabilité accrue des enfants handicapés doit être reconnue et prise en charge par des mesures de prévention et d’éducation réellement adaptées.
L’éducation sexuelle adaptée : une question de dignité et de droits
L’un des facteurs majeurs expliquant cette vulnérabilité est le manque d’éducation à la sexualité. Encore aujourd’hui, trop de personnes – y compris dans nos institutions – entretiennent le préjugé que les enfants ayant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l’autisme n’ont pas de sexualité, ou que celle-ci est secondaire.
C’est faux. Ces enfants ont les mêmes besoins que tous les autres : comprendre leur corps, savoir dire non, identifier les comportements abusifs, développer des relations respectueuses. Leur refuser cette éducation, c’est les condamner à l’ignorance et les exposer davantage aux prédateurs.
L’éducation sexuelle adaptée n’est pas un luxe, c’est un droit fondamental et nécessaire pour leur protection.
Des programmes comme Voies et Boussole : une avancée, mais…
Le ROPHCQ salue le travail du centre Marie-Vincent, qui développe depuis trois ans des outils adaptés pour les enfants de 4 à 12 ans vivant avec une déficience intellectuelle légère, un TSA léger ou des troubles du langage. Les premiers retours sont positifs et démontrent à quel point le besoin est criant.
Cependant, nous devons rappeler que ces initiatives isolées ne suffisent pas. Il faut que le ministère de l’Éducation et celui de la Santé et des Services sociaux prennent leurs responsabilités pour que ces outils soient déployés partout au Québec, dans toutes les écoles, dans tous les camps de jour, dans toutes les familles qui en ont besoin. Il ne peut pas s’agir d’un privilège réservé à quelques milieux pilotes.
Agir collectivement
Nous savons que la violence vécue par les enfants handicapés est largement sous-déclarée, notamment en raison des difficultés de communication, de la dépendance à des adultes et de la honte qui entoure encore trop souvent les abus sexuels. Tant que le gouvernement n’agira pas de façon systémique – financement, formation des intervenants, accessibilité aux programmes de prévention adaptés –, les enfants handicapés continueront d’être surreprésentés parmi les victimes d’agressions sexuelles.
Ce que nous demandons
- Que l’éducation à la sexualité adaptée soit garantie par l’État, et non laissée au bon vouloir d’organismes qui doivent sans cesse se battre pour obtenir du financement.
- Que les programmes de prévention comme Voies et Boussole soient reconnus et financés à long terme pour couvrir tout le Québec.
- Que les intervenants scolaires, communautaires et institutionnels reçoivent une formation obligatoire pour mieux prévenir, détecter et intervenir auprès des enfants handicapés victimes de violence sexuelle.
Conclusion
Protéger nos enfants handicapés contre la violence sexuelle, ce n’est pas seulement développer de nouveaux outils. C’est reconnaître leur dignité, leur droit à la sécurité et leur pleine citoyenneté.
Nous ne pouvons plus nous contenter de constats. L’État québécois doit faire de la protection des enfants handicapés une priorité politique et budgétaire.
Parce qu’un enfant handicapé est d’abord et avant tout un enfant qui a droit à la sécurité, au respect et à la justice.
